L’ajout de la technique d’hypoventilation volontaire à l’entraînement de sprints répétés à un impact important pour les athlètes de sports collectifs. La vitesse de sprints est alors mieux maintenue même avec la fatigue due à l’accumulation d’efforts maximaux. Ceci est particulièrement intéressant en fin de partie où le succès de l’équipe est en jeu. Il devient alors très simple de bonifier l’entraînement et de démocratiser l’accès au stress hypoxique.
Avec les progrès technologiques et la quête incessante de battre des records sportifs, les scientifiques ainsi que les entraîneurs tentent par tous les moyens de développer des techniques permettant d’optimiser les performances et de repousser les limites du corps humain. Parmi les avenues possibles, nous retrouvons l’ajout d’un stress physiologique imposant à l’entraînement pour espérer une surcompensation et ainsi mieux performer au jour J. L’une des premières options qui nous vient en tête est l’entraînement en altitude, soit un stress hypoxique où la saturation d’oxygène inspiré est plus faible, ce qui abaisse la saturation artérielle (SpO2).
Cette diminution de la SpO2 combiné avec un entraînement permet de nombreuses adaptations, dont l’augmentation de la concentration de globules rouges, primordiale pour le transport et l’approvisionnement d’oxygène aux muscles. Toutefois, même si la plupart des entraîneurs connaissent les vertus de l’ajout de l’hypoxie à l’entraînement, elle reste un mirage. En effet, seulement les équipes professionnelles peuvent se permettre des camps d’entraînement en montagne ou encore de s’acheter des appareils générant un milieu hypoxique, laissant ainsi tous les autres sportifs privés de cette modalité d’entraînement très alléchante.
Pour contourner cette problématique, il ne suffit que de bloquer l’apport en oxygène, soit en arrêtant de respirer lors d’effort pour diminuer la SpO2. Plus l’intensité de l’effort est grande, plus l’hypoxémie sera forte. Lorsque cette technique est appliquée à l’entraînement, nous nommons cette technique l’hypoventilation volontaire à volume pulmonaire réduit (VHL). Cet article vous apprendra comment ajouter cette technique innovante à l’entraînement et ces avantages.
Comment mentionné précédemment, l’objectif est de généré l’hypoxie la plus sévère possible et pour se faire nous devons bloquer l’apport d’oxygène à l’effort et travailler à de hautes intensités. Nous allons analyser ces deux aspects. Premièrement, il serait inutile de bloquer sa respiration avec les poumons remplis d’oxygène, soit après une grande inspiration. Avant l’effort, il faut ainsi expirer normalement pour évacuer l’air des poumons, puis faire notre effort sans respirer (Woorons et al., 2007, 2010).
Deuxièmement, il faut une activité qui permet des efforts intenses, par exemple des sprints à la course, sur vélo, sur rameur, etc. Ce qui est important est d’enchaîner des périodes d’efforts pour cumuler la plus longue période d’hypoxémie totale. Parmi les quelques recherches sur le sujet, l’enchaînement de 8 intervalles d’effort de 6 secondes de sprints en VHL pour 24 à 30 secondes de récupération serait un ratio suffisant pour générer une diminution de la SpO2 (Woorons et al., 2019).
Pour escompter des adaptations à long terme, il faut repéter pour un total de 3 séries dans la séance et les faire 2 fois par semaine sur une période de 4 semaines. Les préparateurs physiques connaissent bien ce type d’entraînement, soit la capacité à répéter des sprints (repeated-sprints ability, RSA).
Toutefois, avant d’ajouter le VHL à des séances, il est important de se familiariser avec la technique en effectuant des sprints de plus en plus intenses. De plus, si vous administrez cette technique à un groupe d’entraînement, soyez attentifs aux symptômes comme les maux de tête, les étourdissements et le patron respiratoire déficient lors des récupérations. N’hésitez pas à ajuster l’entraînement en conséquence.
Nombreux d’entre vous avez probablement déjà vu sur internet les masques dits « hypoxiques » ventant les bienfaits de créer une hypoxémie. Ces masques sont dotés de filtre qui diminue le volume d’air respiré.
Toutefois, il est important de se rappeler que pour avoir une hypoxie, il est important d’avoir une diminution de la SpO2. Or, même si le volume d’air est plus faible, la fraction d’oxygène inspiré reste la même, soit à 21% d’oxygène. Ainsi, aucune hypoxie n’est générée comparativement au VHL où le blocage respiratoire complet permet de diminuer la SpO2.
Ces masques sont-ils alors complètement inutiles? Non, pas si l’objectif est de travailler les muscles respiratoires, car le filtre crée une résistance que nos muscles doivent vaincre afin d’avoir un volume d’air suffisant.
L’entraînement de la RSA est très pertinent pour les athlètes de sports collectifs où les efforts sont intenses, intermittents et avec peu de périodes de récupération. Ces caractéristiques de l’activité font en sorte qu’une grande fatigue s’accumule et affecte directement la performance en fin de partie. En ces derniers moments critiques, une simple possession du ballon peut changer l’issue du match. C’est pour cette raison que l’entraînement en RSA a vu un grand essor dans les dernières années et comme pour toutes les modalités d’entraînement, il fut amené à être optimisé.
L’ajout du VHL lors de séances de sprints répétés permet une augmentation de la performance de 23 à 30% comparativement à un entraînement fait avec une respiration normale (Lapointe et al., 2020; Woorons et al., 2019, 2020). Prenons pour exemple le projet de recherche que j’ai conduit dans la dernière année lors de ma maîtrise en kinésiologie pour mieux comprendre ce résultat. Nous avons comparé les résultats d’un test de 12 sprints de 20 mètres (30 secondes de récupérations semi-actives entre les sprints) avant et après 8 séances de sprints répétés selon deux conditions, contrôle et VHL.
Les participants étaient des joueurs de basketball de calibre universitaire et ils ont suivi un protocole d’entraînement similaire à celui expliqué dans la précédente section. Nous avons observé, sans surprise, une augmentation du temps pour compléter les sprints avec l’enchaînement des répétitions. Toutefois, l’augmentation du temps des sprints fut beaucoup moins prononcée chez les participants s’étant entraînés avec la technique de VHL. Ceci fut observé par le calcul sur score de détérioration de la performance qui fut 23% plus bas et avec une différence statistiquement significative.
L’ajout de la technique d’hypoventilation volontaire à l’entraînement de sprints répétés à un impact important pour les athlètes de sports collectifs. La vitesse de sprints est alors mieux maintenue même avec la fatigue due à l’accumulation d’efforts maximaux. Ceci est particulièrement intéressant en fin de partie où le succès de l’équipe est en jeu. Il devient alors très simple de bonifier l’entraînement et de démocratiser l’accès au stress hypoxique.